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Le supplément d'âme de votre cours de français
25 avril 2013

introduction # OE ROMAN

Introduction OE 4 : Le roman, personnage et vision du monde

 

I.                  Origine du roman.

µ On appelle « roman », à l’origine, tout ce qui est écrit en langue romane, c’est-à-dire dans la langue vernaculaire (= populaire) et non en latin.

C’est au XIIème et XIIIème siècles que sous ce nom, on désigne les récits en vers écrits en français, qui retracent les exploits des héros de la chevalerie ou les grandes quêtes médiévales comme la quête du Graal. Ces « proto-romans » ne sont pas sans rappeler les grandes épopées antiques.

Tristan et Iseult ou Lancelot, le chevalier à la charrette sont ainsi de grands « romans » médiévaux, bien qu’ils soient tous écrits en vers.

Notez : A cette époque, la notion d’ « auteur » est très vague, presque anachronique. La plupart des récits étant constitués d’une matière légendaire se transmettant par oral, il est difficile d’attribuer à l’auteur de roman l’ « invention » de son sujet.

µ Au XVIème siècle, Don Quichotte, de Cervantès, écrit en langue espagnole, apparaît classiquement comme le premier roman moderne. Il se démarque de la tradition chevaleresque par le biais d’un personnage haut en couleur, parodie du chevalier médiéval. Il annonce de fait la mise en scène de personnages moins héroïques, motif qui sera particulièrement développé dans le roman dit « picaresque », où le héros est de condition modeste. La modernité de ce roman est sensible notamment à travers la forte implication du narrateur, qui juge sans cesse DQ.

II.               Evolution du genre romanesque, du XVIIème siècle au naturalisme du XIXème.

µ A l’âge classique le roman est encore un genre mineur. C’est le théâtre qui domine le siècle. Néanmoins, le genre continue d’évoluer. Il représente la vie de cour et s’intéresse à l’intériorité des personnages plus qu’à leurs actes. C’est le cas de La Princesse de Clèves, de Mme de La Fayette, qui, pour la première fois dans le roman français, narre avec précision et force d’introspections  le cheminement amoureux, par l’exemple des amours contrariées de la princesse et du duc de Nemours. On a pu le considérer comme un roman « précieux » (en référence à la préciosité).

µ Le XVIIIème siècle voit le genre romanesque se développer, sous des formes variées. Le roman épistolaire naît, avec notamment les Liaisons dangereuses, de Laclos, qui s’affiche de plus comme l’un des grands romans libertins du siècle. Avec Jacques le fataliste et son maitre, Diderot fait franchir au genre un nouveau pas vers la modernité : le narrateur y brise régulièrement l’illusion romanesque, par un feuilletage narratif complexe, reposant sur de nombreux enchâssements et par les interventions constantes d’un narrateur qui ne cache pas se jouer du sort de ses personnages. Le dialogue y prend le pas sur la narration.

Notez : Jugé genre mineur et subversif, particulièrement pour les femmes dont on estime qu’elles en sont le public de prédilection,  le roman est frappé de proscription dans les années 1737. Il en parait alors clandestinement.

µ Le XIXème est l’âge d’or du roman. Il se développe en trois temps, en fonction des grands mouvements littéraires du siècle que sont le romantisme, le réalisme puis le naturalisme.

Le romantisme remet au gout du jour le motif de l’intériorité, en réponse au rationalisme exacerbé des Lumières. De grands romans du « je » mettent alors en scène le héros romantique, de préférence en proie au « mal du siècle » : Werther, de Goethe, Adolphe, de Benjamin Constant ou  Oberman de Senancour sont les chefs d’œuvre de l’époque. Les personnages s’y interrogent sur leur place dans la société.

Le héros réaliste, lui, au contraire est un ambitieux qui veut prendre toute sa place dans la société. On parle alors de roman « d’apprentissage » : le personnage doit assurer son ascension au prix d’épreuves sociales le poussant parfois à revêtir le masque de l’hypocrite ou à recourir à la séduction calculée. Les personnages de Balzac comme Rastignac ou Rubempré en sont les modèles. C’est aussi le cas de Julien Sorel, du Rouge et le Noir, de Stendhal.

Mais le roman se veut aussi social. Les Misérables, l’immense fresque d’Hugo, peint avec pathétique la déchéance de Fantine et l’impossible rédemption de Jean Valjean. La réalité du siècle est alors évoquée, à travers ses misères et ses injustices, bien qu’elle touche au sublime.

Notez : Balzac initie avec le cycle de la « comédie humaine » une vocation particulière du genre romanesque, qui se veut alors capable de contenir toute la diversité de l’époque et de la société française, comme Zola le fera plus tard avec les Rougon-Macquart. Les personnages tendent au « type » : ils incarnent alors des caractères sociaux (la femme mariée, le médecin de campagne, le rentier…).

µ A la charnière du XIXème siècle, le réalisme de Flaubert marque une nouvelle étape de la modernité. En 1857, parait Madame Bovary, ouvrage phare du roman français, qui met en scène l’insatisfaction et la rêverie chroniques d’une provinciale elle-même nourrie de lectures précisément « romanesques », que sa réalité de femme mal  mariée désespère. C’est, aux dires de son auteur, un « roman sur rien ». Plus tard, parait Bouvard et Pécuchet, héritier de la tradition picaresque : dans cette œuvre inachevée, deux personnages médiocres se lancent dans des collections insolites au prétexte d’embrasser « tous les savoirs du monde ». L’entreprise tourne au final au réinvestissement de simples « idées reçues », soulignées par l’ironie du narrateur.

µ Dans le dernier tiers du XIXème, c’est le naturalisme, dont Zola est le chantre, qui domine. Le roman est alors à l’apogée de sa fortune. A travers des techniques narratives parfois complexes, laissant la part belle à la mise en scène de la parole des personnages, notamment par le prisme du discours indirect libre qui chez Zola semble souvent épouser la voix du narrateur, se développe comme chez Balzac la volonté de dépeindre les grands types de l’époque. Mais pour Zola et ses suivants, le roman est « expérimental » : lieu d’une véritable expérience « scientifique », héritée du positivisme, le personnage est soumis sous la plume du romancier à une série de tests. En fonction de son hérédité et  de l’influence du milieu où le récit le plonge, il évolue selon un destin comme « prédéterminé », que le romancier se plait à observer.

III.           La crise du roman et de la représentation au XXème siècle.

µ Le traumatisme des deux guerres marque un nouveau tournant : le roman interroge un monde en crise, qui a fait l’expérience du mal et dont les valeurs sont remises en question. C’est ce que traduisent les grands romans de la période 1920-1950, comme le Voyage au bout de la nuit, de Céline, ou les chefs d’œuvre de Camus, de L’Etranger à La Peste. C’est, plus que jamais, l’heure des anti-héros, en marge des codes sociaux.

µ L’illusion réaliste a suffisamment opéré. C’est le constat que font les nouveaux romanciers lorsque, dans les années 50, ils bouleversent à leur tour les conventions romanesques, et particulièrement la place réservée au personnage. De nouvelles modalités narratives apparaissent alors. Dans La Modification, Michel Butor inaugure ainsi une étrange narration à la 2eme personne du singulier, le personnage devenant, par le prisme de l’identification, le lecteur. De même, dénué de toute psychologie, le « nouveau roman » se centre sur des objets, comme dans La Jalousie, d’Alain Robbe-Grillet, ou Les Choses, de Perec, roman de la consommation moderne.

µ Cette mise à distance est encore opératoire dans le roman contemporain. Nous sommes dans ce que l’auteur Nathalie Sarraute appelait « l’ère du soupçon », le héros se « dépersonnalise ». A la limite des genres de la fiction, le roman se déploie dans une esthétique nouvelle, qui emprunte au témoignage, au documentaire, au biographique. C’est dans ce contexte qu’il convient d’inscrire L’Adversaire, paru en 2000, qui propose d’examiner le cas d’un héros monstrueux, et bien réel, dans un récit-frontière, à la fois polyphonique et personnel, relatant dans le jeu de l’objectivité les difficultés du romancier face à son sujet.

 

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